Hélène Langevin-Joliot

Présidente de l’Union  rationaliste, pour le bureau de l’UR

25-03-2011

Réflexions et questions après les événements du Japon. Catastrophes naturelles et accident nucléaire

Le Japon vient de connaître un enchaînement de catastrophes. Le 12 mars, un séisme d’intensité exceptionnelle (9 sur l’échelle de Richter) a provoqué un tsunami dont l’amplitude a dépassé celles connues dans le pays de mémoire d’homme. Il s’en est aussi suivi sur le site de Fukushima un accident nucléaire d’une extrême gravité, faisant craindre le pire.

Les technologies antisismiques sophistiquées mises en œuvre, ont semble-t-il, efficacement préservé les bâtiments dans les zones touchées, y compris les bâtiments de grande hauteur à Tokyo ou Sendai et ceux des réacteurs de la centrale de Fukushima, qui se sont mis en arrêt d’urgence comme prévu. En revanche, les dispositifs anti-tsunami ont été débordés, la montée brutale de l’eau balayant les villes et village côtiers et les terres agricoles : le bilan en nombre de victimes s’alourdit de jour en jour. Les pertes humaines sont évaluées autour de 20 000 morts ou disparus et les destructions sont immenses. Le tsunami a aussi envahi les installations techniques des six réacteurs de la centrale de Fukushima, les privant de l’alimentation en électricité et en eau absolument nécessaire pour assurer leur refroidissement à l’arrêt. Nous n’avons ni les informations sur les dispositifs mis hors d’état ni la compétence pour commenter les procédures utilisées pour faire face à cette situation. Des explosions et des décisions de dépressurisation se sont traduites par des rejets de radioactivité dans l’atmosphère, la population a été évacuée dans une zone de 30 km autour de la centrale. La situation semble être en cours de stabilisation, mais non réglée.
Quoi qu’il arrive, on peut déjà dire que le Japon va devoir faire face à la pire situation qu’il ait connue depuis la deuxième guerre mondiale. Malgré le niveau technologique élevé de la société, la reconstruction demandera des efforts économiques considérables, assortis de choix difficiles.

Il est trop tôt pour qu’un bilan complet du désastre et une description détaillée de son déroulement puissent être établis. Une analyse rationnelle de ces éléments est indispensable à toute réflexion sérieuse sur ce qu’il convient de faire ou non à l’avenir, au Japon et dans le monde. On soulèvera ici seulement des questions d’ordre général. La volonté de faire respecter la non-prolifération des armes nucléaires a conduit l’ONU à donner à l’Agence de l’énergie atomique (AIEA) des pouvoirs de contrôles réels qui s’imposent aux États. La sécurité optimale des centrales nucléaires, qui concerne de fait tous les États, ne devrait-elle pas être garantie collectivement aussi ? L’AIEA n’est dans ce domaine qu’un organisme de coopération, elle délivre des recommandations qu’il est loisible à chacun de suivre ou non. La mise en concurrence d’entreprises privées qui se doivent de rémunérer le capital investi, ne va pas nécessairement de pair avec le choix des meilleures conditions de sureté : c’est le moins que l’on puisse dire au vu des conflits qui ont surgi précédemment entre l’exploitant et l’agence de sureté nucléaire du Japon. En attendant, des campagnes de tests et de contrôles renforcés des centrales existantes ont été lancées par différents gouvernements. Ici et là des moratoires ont été annoncés. Qu’il s’agisse de la mondialisation économique, de l’évolution du climat, de l’énergie ou du partage et de la gestion de l’eau, les besoins de régulation sur une planète toujours plus interactive se font de plus en plus pressants.

En France, si les images du tsunami ont frappé l’opinion, les commentaires se sont concentrés, au lendemain même du drame, sur la question nucléaire plutôt que sur le sort des rescapés. Le déroulement de l’accident pose de nombreuses questions, même pour un observateur un peu averti. On notera que les autorités françaises ont sensiblement amélioré la mise à disposition des informations. On reconnaîtra que les journalistes ont généralement fait appel à des personnalités qualifiées pour les éclairer. Les opposants au nucléaire se sont mobilisés pour réclamer, les uns l’arrêt immédiat des centrales françaises, les autres un débat et/ou un référendum. Il est temps d’inclure le débat nucléaire dans le débat plus large sur les différents modes de production d’énergie et d’économie d’énergie, sur leurs avantages et leurs risques, sur leurs disponibilités concrètes et leurs coûts, sur leurs potentiels d’amélioration, en laissant de côté les a priori idéologiques. Un Grenelle de l’énergie cependant n’aurait de sens qu’en faisant l’effort de donner au débat sur une politique future une base solide, celle d’un constat scientifique et technique partagé. Quant au référendum, il n’est envisageable qu’à l’issue d’une campagne d’information suffisamment prolongée et efficace conduite par une instance nationale réputée neutre et objective sous peine de n’être qu’une mesure de politique populiste destinée à séduire une partie de l’opinion sans grand souci de l’intérêt général.
On trouve des informations détaillées de qualités sur les sites officiels : Autorité de sûreté nucléaireInstitut de radioprotection et de sûreté nucléaire.

 

Pour le bureau de l’Union rationaliste, la présidente Hélène Langevin-Joliot

Vous trouverez prochainement sur le site des éléments d’information et des questions sur l’accident de Fukushima et ses réacteurs, sur les notions de doses, et sur la comparaison de différents modes de production d’énergie, etc. Un espace sera ouvert pour les questions ou courts commentaires des visiteurs dans la perspective d’un dossier plus étoffé.

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