



L'édito de l'Union
L’été des catastrophes climatiques :
non au déni de la science
16/09/2023
L’été 2023 a été celui de toutes les catastrophes climatiques sur l’ensemble de la planète : bulle de haute pression et envolée des températures sur l’Atlantique Nord, asséchements des sols, immenses feux de forêts au Canada et incendies meurtriers à Hawaï et en Grèce, gigantesques inondations en Libye, fonte accélérée des glaces aux deux pôles…En France, la population a bien souffert de la canicule et du manque d’eau dans une large partie du pays.
Certains de ces événements extrêmes excèdent même les prévisions statistiques du plus pessimiste des scénarios du GIEC. Ils laissent présager d’énormes tensions dans les sociétés pendant les décennies à venir : des conflits violents dans les pays en développement, des pénuries dans les pays développés et de vastes déplacements contraints de population.
Réagir pour minimiser les désastres est encore possible, mais les clés sont évidemment dans les mains des politiques. Les engagements non contraignants de la COP21 de Paris n’ont pas été suivis d’effets, bien au contraire : cinq ans plus tard le réchauffement moyen a parfois dépassé les limites prévues pour l’horizon 2050…La construction de centrales à énergie fossile progresse en l’absence d’enfouissement du CO2, les compagnies aériennes prévoient l’augmentation de leur trafic dans la décennie à venir, les grandes entreprises adoptent une attitude pseudo vertueuse de « verdissement » sans réduire significativement leurs émissions de gaz à effet de serre…
Le découragement pourrait bien naître en France après le refus par le pouvoir exécutif de suivre la plupart des recommandations de la Convention citoyenne pour le climat. Certes, les personnes sensées ne peuvent pas réfuter l’évidence du changement climatique aujourd’hui. Mais combien n’admettent pas que la contribution humaine soit déterminante (un tiers des Français selon les sondages) ? Et combien d‘entre nous adhèrent à la totalité du message sans appel du GIEC ? Le déni de cette nouvelle réalité, pourtant scientifiquement établie, n’est pas lié à des faits ou des preuves, mais peut-être à un désir irrationnel de continuer à vivre « comme avant » le plus longtemps possible…
Chacun d’entre nous se demande : mais que faire à mon niveau face à ce défi mondial ? Prendre l’avion le moins possible ? Manger moins de viande ? Réduire le bilan carbone dans mes activités professionnelles (ce que font les chercheurs avec le mouvement « labo 1point5 ») ? Réorienter mes activités dans une voie favorable à l’écologie ? Rejoindre des formes nouvelles de mobilisation, comme les Soulèvements de la Terre, qui osent attirer l’attention du public sur les dégradations de l’environnement par des actions spectaculaires ? Tout est nécessaire mais pas suffisant.
L’Union rationaliste appelle à ne pas perdre de vue l’aspect très politique et international de la question. Il est inquiétant que la présidente du parlement européen invite la Commission européenne à revenir sur le « pacte vert ». En France, c’est à droite et à l’extrême droite que se manifeste l’opposition la plus ferme à toute forme de lutte pour le sauvetage de la planète taxé d’« écoterrorisme ». Cette opposition a des racines plus idéologiques que simplement économiques. Elle met en balance une « écologie punitive », qui serait la marque de la gauche, et une « écologie du bon sens », promue par le RN qui, de façon démagogique, « entend dénoncer tout ce qui menace de perturber le mode de vie et de consommation des Français et pousse ainsi au rejet des éoliennes, du zéro artificialisation des sols, à la défense de la voiture individuelle, des pavillons et de l’agriculture productiviste au nom de l’« enracinement », etc. »[1].
Avec ce dramatique déni du danger climatique, confortable et rassurant pour beaucoup de nos concitoyens, il y a un risque majeur qu’il faudra prendre en compte au cours des affrontements politiques à venir. L’Union rationaliste rappelle que la « punition » est celle des catastrophes climatiques qui retomberont sur toutes les populations, en commençant par les plus vulnérables. Plus les politiques, en France comme dans le monde, tarderont à agir à grande échelle, plus le remède sera douloureux et coûteux.
Michèle LEDUC, pour le bureau de l’UR
[1] Le Monde Editorial du 14 août 2023
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Alain Policar est politologue et philosophe, professeur au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof). Dernier livre paru : L’inquiétante familiarité de la race. Décolonialisme, intersectionnalité et universalisme, Le Bord de l’eau, 2020.
RECHERCHE PAR THÈME
n°686
Les Cahiers Rationalistes
• Septembre – octobre 2023
n°226
Raison Présente
• Juin 2023