L'édito de l'Union
Trump président
ou
Comment meurent les démocraties
20/12/2024
Une grande inquiétude a saisi toutes les démocraties du monde lorsqu’ a été annoncée la seconde victoire de Donald Trump aux élections présidentielles de novembre 2025. Un président suprémaciste, masculiniste, d’extrême droite, qui nie le dérèglement climatique…rien de bon aloi ; mais surtout la majorité des électeurs américains n’ont pas hésité à réélire un président qui avait osé s’attaquer aux normes de la constitution américaine en orchestrant la violence au Capitole le 6 janvier 2021 pour invalider les résultats des élections, sans oublier le détournement de documents de haute sécurité d’État. Quand les règles du jeu des principes constitutionnels ne sont plus respectées s’installe une menace existentielle sur la démocratie. Cette victoire nous concerne tous à bien des égards.
D’abord elle confirme que nous sommes entrés dans un grand désordre informationnel. Trump, qui qualifie les journalistes d’ennemis du peuple, a fait de la violence langagière et des mensonges son carburant politique. Mais désordre ne signifie pas chaos, bien au contraire : il a construit un discours contradictoire systématique et efficace pour décourager la pensée rationnelle, ne laissant place qu’à la haine et à l’indignation. Dans ses bagages il a entraîné Elon Musk, patron des satellites Starlink et de Tesla, l’homme le plus riche du monde et de l’histoire, qui a fait pour lui une campagne de propagande faisant feu de tout bois à travers sa plateforme X (ex-twitter)[1] ; et voici qu’il vient de le nommer à la tête d’un ministère de l’« efficacité gouvernementale » !. Musk se croit donc maintenant tout permis à l’échelle de la planète :il s’immisce dans la campagne électorale allemande en qualifiant l’Alternative für Deutschland (AfD), un parti d’extrême droite, de “sauveur du pays”. La majorité des citoyens vivent à l’heure de la toute-puissance des réseaux sociaux et de leurs algorithmes, dont une fraction gravite hors sol dans le champ des thèmes complotistes. Et le monde de l’argent orchestre la désinformation, comme on le voit aux Etats-Unis avec Elon Musk mais aussi en France où le milliardaire Vincent Bolloré étend son empire médiatique. On assiste à la concentration des médias[2] et à leur dérive vers l’extrême droite (voir Fox News aux Etats-Unis ou Cnews en France). Et la fatigue informationnelle nous gagne, face à l’immédiateté et à la difficulté de distinguer le vrai du faux. Comme l’analysait déjà Hannah Arendt « ce qui rend possible un État totalitaire ou une dictature, c’est que les gens ne sont pas informés […]. Si tout le monde vous ment en permanence, la conséquence n’est pas que vous croyez aux mensonges mais plutôt que personne ne croit plus en rien »[3].
Ensuite il est troublant de constater qu’Elon Musk est suivi par les géants de l’industrie de la tech californienne qui se rallient à l’idéologie d’extrême droite pour faire advenir un monde orwellien. On pourrait pourtant attendre des grands scientifiques de notre temps un redressement de la vérité des faits : la cyberguerre n’est pas la paix, le traçage des individus n’est pas la liberté… La victoire de Trump marque la perte d’influence en politique des experts qui ont une connaissance réelle de la vérité des faits, comme l’atteste le choix du conseiller scientifique de la Maison Blanche qui a pris notoirement pendant le Covid des positions à rebours des connaissances de la science. Les climatodénialistes utilisent partout des stratégies de contournement pour étendre leur influence[4]. Quand les vrais enjeux sont escamotés, il y a un renversement des valeurs d’autant plus difficile à combattre que les citoyens oublient ce que pourtant ils savent (par exemple que le climat se réchauffe dramatiquement). Sans le garde-fou des arguments rationnels, les régimes démocratiques ne sont plus protégés contre une dérive autoritaire susceptible d’entraîner les indécis et les plus désabusés.
Les démocraties sont fragiles et peuvent mourir dès que leurs principes fondamentaux sont attaqués. Leur vitalité repose certes sur les partis politiques qui les font vivre tant qu’ils résistent au populisme et à l’intimidation comme levier politique[5] ; elle dépend aussi de la capacité des citoyens à s’investir dans les corps intermédiaires (syndicats, associations comme l’UR, la Ligue des Droits de l’Homme, Amnesty International et bien d ‘autres) pour remettre les faits au centre du débat politique. La réélection de Donald Trump devrait donner à réfléchir aux Français quand ils retourneront aux urnes.
Michèle LEDUC pour le bureau de l’UR
[i]Notons que beaucoup de scientifiques et certains médias tel Mediapart viennent de quitter le réseau social X.
[ii] En France Arcom vient d’évincer deux chaînes de télévision C8 et ERJ12 du bouquet des fréquences de la TNT.
[iii] Hannah Arendt en 1974 dans une interview à la New York Review of Books.
[IV] Voir David Chavalarias, auteur du rapport “les nouveaux fronts du dénialisme et du climato-scepticisme ».
[V] Voir Damien Larrouvé « menace sur la démocratie » dans la vie des idées.
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L’hydrogène : un matériau d’avenir pour stocker et transporter de l’énergie ?
• L’intérêt de l’hydrogène (H2) dans le domaine de l’énergie tient d’abord au fait que 1 kg d’hydrogène permet de stocker autant d’énergie que ~ 4 litres d’essence (ou 3kg). Il réagit facilement avec le dioxygène pour donner de l’énergie thermique (combustion) ou électrique (pile à combustible).
• Il peut être utilisé pour stocker ou transporter de l’énergie et, dans certaines conditions, il concurrencera l’électricité. Mais 1 kg de H2 gazeux occupe un volume environ 2 800 fois plus grand que 4 l d’essence dans les conditions ordinaires de pression et de température. Pratiquement, qu’il s’agisse de stockage ou de transport, le gaz est souvent comprimé dans des bouteilles en acier à une pression pouvant atteindre 700 fois la pression atmosphérique (à cette pression, en prenant en compte la masse du réservoir, la densité d’énergie par kg est réduite d’un facteur ~15). On développe aussi des procédés de stockage de H2 dans des matériaux solides, avec des densités d’énergie comparables à celle assurée par une compression à 700 bars.
• H2 peut s’enflammer avec l’air et/ou exploser en cas de fuite. Comme c’est le cas pour de nombreux produits inflammables, son utilisation demande donc des précautions particulières.
• Aujourd’hui, plus de 90% de H2 est obtenu à partir d’hydrocarbures, mais il peut aussi être produit par électrolyse de l’eau, c’est-à-dire à partir d’électricité et d’eau, avec un rendement énergétique qui peut atteindre, voire dépasser 80%. La production par électrolyse ne génère aucune pollution.
• On peut aussi produire H2 par des procédés biologiques, à partir de la biomasse ou de certains déchets. Cette production est concurrencée par celle de méthane.
• La façon la plus prometteuse d’utiliser l’énergie chimique de H2 est de mettre en œuvre une pile à combustible. De l’énergie électrique est alors directement obtenue de H2 et O2 avec un rendement de 50% à 60% aujourd’hui (plus de 90% bientôt) et un moteur peut convertir cette énergie électrique en énergie mécanique avec un rendement proche de 1. Cet usage de H2 produit de l’eau et n’est accompagné d’aucune pollution.
• Il existe aujourd’hui des voitures et des autobus électriques utilisant le H2, bientôt des trains et même des « vélos ». Un kg de H2 permet à une voiture « ordinaire » de parcourir une soixantaine de km. Mais ce qui manque encore, c’est un réseau dense de distribution de ce gaz.
• H2 est susceptible d’être très largement utilisé pour stocker et transporter de l’énergie. En particulier, il pourrait être fait largement appel à ce gaz pour le stockage de l’électricité des sources intermittentes dans les périodes de surproduction…
L’électricité dans la transition énergétique
L’électricité tient une place à part dans le mix énergétique : ce n’est pas une énergie directement disponible dans la nature. Sa production est le résultat d’un processus industriel où une énergie primaire (pétrole ou charbon, vent ou énergie solaire, énergie potentielle d’une chute d’eau) est convertie en électricité.
La production mondiale d’énergie dite primaire représente, en 2017, 14 milliards de tonnes d’équivalent pétrole (TEP). Les énergies fossiles classiques atteignent 81 % du total et l’électricité « directe » (nucléaire, hydraulique, EnR et un peu de biomasse) 10 % du total.
Carte blanche à Jean-François Delfraissy
Science, politique et société : l’exemple de la covid 19
Le 19 avril 2022:
Conférence de Jean-François Delfraissy (médecin et professeur de médecine) à 19 h 30 dans l’Amphithéâtre Henri Mineur de l’Institut d’Astrophysique de Paris, 98-bis Boulevard Arago, 75104 Paris.
La science, en particulier la médecine, a dû faire face au Covid 19 dont le mode d’action était complètement inconnu. Le monde scientifique a réussi toutefois à proposer un vaccin dans un laps de temps particulièrement rapide, en moins d’un an. Trop rapide aux yeux de certains. Expliquer, convaincre, s’ajuster en fonction des mutations permanentes d’un virus, avouer ses doutes tout en devant rassurer relève d’une gageure qu’il fallait relever coûte que coûte. li en va de la cohésion d’une société tout entière, de la crédibilité de l’action politique et de la parole de l’expert. L’exemple de la Covid 19 est un cas d’école qui continue à nourrir nos actions et nos réflexions…
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