Roger Martin du Gard fut un écrivain très apprécié, prix Nobel de littérature, aujourd’hui quelque peu oublié, il est encore lu cependant. On sait qu’il se déclara athée, et il le resta jusqu’à la mort, même si la question de Dieu ou de la religion l’a préoccupé tout au long de sa vie. Nous disposons maintenant de son Journal, de sa correspondance générale, de sa correspondance avec Copeau, Gide, Dabit… Surtout son roman inachevé Maumort a été publié (la version intégrale en Pléiade), il est donc possible actuellement de cerner au mieux la pensée de Roger Martin du Gard.
Ce fut un matérialiste, lecteur de Renan, Taine, Le Dantec et aussi de Montaigne, mais il se déclara toujours comme un piètre penseur, ce qui peut surprendre de la part d’un écrivain qui, dans ses romans, a semblé défendre des thèses. De formation, il est chartiste, passionné par la documentation, aimant la précision : son style, fluide et charpenté s’adapte à ce goût pour l’objectivité et, dans son Journal, a priori écrit intime, on retrouve ce besoin de clarté, comme s’il écrivait pour un lecteur qui n’est autre que lui-même.
Roger Martin du Gard prétend ne pas comprendre les philosophes et d’ailleurs il avoue, dans son Journal, éviter les relations intellectuelles, prétendant se sentir inférieur aux grands penseurs qu’il a l’occasion de croiser. Son athéisme ne serait pas la conséquence d’une réflexion mais plutôt comme un atavisme ne dépendant pas de lui.
Qu’en est-il vraiment ? Faut-il croire l’auteur ou supposer qu’il serait plus philosophe qu’il voudrait bien l’avouer, mais cachant ses spéculations par pudeur ? Martin du Gard a le goût du secret, toutefois il consent à se livrer dans son Journal intime mais il est difficile de conclure…