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Chahla Chafiq

Écrivaine et sociologue

Les Cahiers Rationalistes
n°662

Cahier Rationaliste N°662 - Septembre-octobre 2019

Religion/politique/identité : la pensée critique mise à l’épreuve


PRÉSENTATION DE CHAHLA CHAFIQ PAR MICHÈLE TALFER

Sociologue et écrivaine, iranienne, Chahla Chafiq vit en France depuis 1982. Étudiante, elle a activement participé à la révolution iranienne, à l’époque du Chah Mohamed Reza Pahlavi, et a fait partie des opposants au régime islamiste. Elle a dû s’exiler pour raison politique. Son militantisme pour la défense de la laïcité, des libertés, des droits des femmes, l’a obligée, face au pouvoir islamiste de l’Ayatollah Khomeini, à quitter l’Iran.

De cette expérience douloureuse de l’exil, des conditions de vie en Iran à cette période, Chahla nous livre une analyse peu commune des interactions entre les champs du politique et du religieux, des conséquences de la religion quand elle est érigée en idéologie, sur la vie politique et sociale, sur le statut des femmes, sur la démocratie, sur l’égalité, mais aussi sur une difficile lutte contre l’obscurantisme.

Elle met en regard des situations différentes, Iran, pays du Maghreb, (Algérie, Maroc, Tunisie), France, pour montrer que les relations entre le politique et le religieux s’entremêlent de façon suffisamment complexe, pour que l’analyse de nombre de partis politiques en France, perde toute rationalité, entraînant de fait une incompréhension dès que cela concerne l’évolution de la société.

Elle nous livre une analyse qui explore des sujets brûlants, ce que  représente l’exil dans ces conditions terribles de  dictature, en  particulier d’une dictature religieuse, avec son lot de mesures dramatiques sur la condition des femmes, dans un contexte politique d’islamisme tout puissant.

Son regard de sociologue se double de beaux romans, qui montrent que l’analyse rationnelle ne peut pas s’isoler, là où le poids de l’affectif, parfois aussi douloureux, envahit l’espace.

Quelques uns de ses écrits les plus marquants : 
Parmi ses romans :

  • Chemins et brouillard, recueil de nouvelles sur l’exil et le deuil, 2005, Métropolis
  • Demande au miroir, l’âge d’Homme,

Et par ailleurs, sur le terrain d’une analyse rigoureuse et sans concession de ce que représente l’islamisme omniprésent, la question des femmes et l’image de la femme voilée, etc., elle a publié plusieurs essais sur les causes et les conséquences politiques et sociales de l’idéologisation de l’islam, en particulier face à la situation des femmes :

  • La femme et le retour de l’islam. L’expérience iranienne, éd. Le Félin, 1991
  • Sous le voile, face à la loi islamique (avec Farhad Khosrohad), éd. Le Félin, 1995
  • Le nouvel homme islamiste : la prison politique en Iran, éd. Le Félin, 2002 ;
  • Islam politique, sexe et À la lumière de l’expérience iranienne, PUF, 2011.

Elle mène aussi une vie militante active en France. Elle crée en 2003 l’ADRIC (l’Agence de Développement des Relations Interculturelles pour la Citoyenneté), dont le but est de :

  • Faire connaître, développer et promouvoir la citoyenneté, l’égalité, la liberté et la laïcité en prenant en compte la dimension interculturelle de la société,
  • Contribuer à la lutte contre les violences, le racisme  et  les discriminations (liées au genre, à l’orientation sexuelle, à l’origine, au milieu social, aux convictions et aux croyances),
  • Développer des formations et des recherches et des actions auprès d’acteurs sociaux…

En 2016, Chahla Chafiq est nommée membre du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes. En 2017, pour l’ensemble de ses activités, elle reçoit les insignes de Chevalière de la Légion d’honneur.

Chahlah Chafiq reçoit le prix de l’Union rationaliste en 2017.

Cela traduit un nouvel angle de vision qu’elle apporte à l’Union rationaliste et qui pourra enrichir le groupe Laïcité par ses réflexions, ses écrits et la richesse de son œuvre en général.

En effet, les expériences variées de Chahla Chafiq, dans des pays différents, où des militants actifs résistent aux pressions des fondamentalistes islamistes au pouvoir, donnent des atouts pour démonter les arguments des groupes dits de « lutte contre l’islamophobie » qui prennent prétexte d’un soi-disant « racisme à l’encontre des musulmans », pour impulser une forme d’empathie vis à vis de l’islam politique, courant très sournois mais actif en France.

Ces amalgames entre racisme et dénonciation d’une idéologie politico- religieuse font des dégâts.

Par ses travaux, Chahla Chafiq nous apporte à la fois une connaissance de la situation dans un pays comme l’Iran et, de plus, un regard critique aiguisé quant aux dangers sous-jacents d’une certaine naïveté sur les relations entre politique et religieux entretenues en France vis à vis de l’islam politique.

INTERVENTION DE CHAHLA CHAFIQ
À L’OCCASION LA REMISE DU PRIX DE L’UNION RATIONALISTE

 Je remercie Michèle Talfer de sa présentation riche et intéressante. Je remercie vivement l’Union rationaliste de cette belle récompense. Ayant conscience de l’imperfection de mes travaux, je comprends ce prix surtout comme un encouragement à poursuivre ma réflexion et mon action.

Avec ce prix, vous m’avez offert, aussi, un voyage  très  plaisant  dans mon enfance. En me penchant sur les activités de l’Union rationaliste et en découvrant le nom de ses présidents et présidentes, le portrait de Madame Hélène Langevin-Joliot m’a ramené le souvenir d’un livre que mon père m’avait fièrement offert. Je vois encore la couverture et le titre écrit en très gros caractères : La vie de Madame Curie.

C’était au début des année 60, j’étais à l’école primaire et avide de lecture. J’avais appris à lire très tôt, bien avant d’aller à l’école. Et mon père, jeune interne à l’hôpital, en m’offrant ce livre, voulait me transmettre sa foi en une science humaniste.

En revivant ces souvenirs, j’ai revécu des moments agréables  avec  mon père jeune et plein d’énergie, et je vous en remercie. D’autant plus que ces jours-ci, les images qui nous viennent d’Iran sont plutôt imprégnées d’effroi et d’inquiétude. Les massives contestations sociopolitiques ont comme toujours été étouffées, laissant des dizaines de morts et des milliers d’arrestations qui concernent, pour la plupart, des jeunes de moins de trente ans. La répétition cyclique de ce scénario : contestation/répression témoigne de l’échec cuisant  du pouvoir islamiste qui n’arrive à tenir que par l’exercice de la tyrannie.

C’est ce même scénario qui m’a poussée à l’exil, lors des premières années de l’instauration de ce pouvoir. Ainsi, l’exil a été pour moi le point de départ d’une réflexion sur l’islamisme qui, depuis, n’a cessé de révéler  ses différents visages en tant qu’idéologie et mouvement politique. Il s’est développé non seulement dans différents pays islamiques, mais aussi dans des contrées occidentales dont la France. Pourtant, force est constater que la compréhension de l’islamisme demeure troublée par son lien avec l’islam.

En effet, deux écueils guettent, sans cesse, la compréhension de la nature idéologique de l’islamisme : d’une part, sa  confusion  avec  l’islam, d’autre part, le déni que l’islamisme puise  sa  matière  idéologique dans la  religion. Ces écueils focalisent le débat sur la nature de l’islam : serait-il par nature rétrograde ou bien seraient-ce des phobies nourries d’un racisme occidental qui en déformeraient le contenu ? Cette focalisation sur l’islam balaie tout simplement l’histoire sociale et politique des pays et des peuples concernés.   On oublie facilement, par exemple, que l’idéologie et le mouvement islamiste marquent de leur essor divers pays islamiques depuis la fin des années 1970, alors qu’ils n’y avaient pas le même écho antérieurement.

Pour comprendre le pourquoi et le comment de ces faits, il conviendrait de revenir aux processus qui les ont rendus possibles. On remarque dès lors la cristallisation de plusieurs données politiques au cours du 20e siècle.

Premièrement, les conséquences de ce que j’appelle « la modernité mutilée », à savoir les schémas de modernisation suivis par les dictatures dans les pays dits islamiques. Une modernisation économique et sociale, qui implique un certain degré de sécularisation, tout en refusant les valeurs démocratiques. Il est intéressant de noter, que ce refus a été souvent justifié par l’incompatibilité de ces valeurs avec l’identité islamique des pays. L’on voit ainsi comment cette identité a été instrumentalisée par des dictatures non-islamistes au profit de leur autoritarisme. Par ailleurs, les pouvoirs occidentaux n’ont pas hésité, pour leur part, à soutenir ces dictatures, ni à recourir à l’islamisme pour combattre l’ennemi rouge pendant de la Guerre froide (c’est la fameuse stratégie de la « ceinture verte » qui a favorisé l’islamisme).

Deuxième point : ce tableau serait incomplet  si  l’on  s’arrêtait  au niveau des pouvoirs et  qu’on  oubliait  les  conséquences  de  l’action  et/  ou de la non-action des acteurs non-islamistes qui ne se trouvent pas du côté des gouvernants. En Iran, mais aussi dans d’autres contextes, ils n’ont pas su déceler le danger islamiste et réagir de manière appropriée. Cette incapacité s’explique par une série de confusions et d’illusions : la confusion entre Occident et impérialisme, et entre droits démocratiques et valeurs capitalistes ; la dévalorisation des valeurs démocratiques, et la fascination par les idéaux de « retour aux sources ». Tous ces éléments favorisent chez certains acteurs non-islamistes un accueil bienveillant du discours islamiste. Les dictatures pour leur part perçoivent les islamistes comme le meilleur rempart face à l’opposition de gauche et les ménagent.

Cet ensemble de circonstances offre aux islamistes une occasion rêvée pour se développer. Le vide politique leur creuse une place d’or qu’ils exploitent à fond. À travers les diverses instances religieuse (lieux de cultes, écoles religieuses, divers médias), ils ont les mains libres pour parler aux habitants, propager leurs idées. Leur discours, qu’ils réajustent selon les enjeux du moment, est de plus en plus écouté. 

Et cela nous amène au troisième point : l’idéologie islamiste se décline en divers courants, mais à la base de sa fabrication se trouve la projection de la communauté de foi (l’oumma) unie dans et par la religion, comme le modèle d’une société juste et saine. La religion devient le ciment d’une identité globalisante qui définit et lie l’individuel et le collectif. L’islam se situe à la fois au niveau du politique (la vie de la cité) et de la politique (exercice de gouverner).

La séparation entre l’espace privé et l’espace public, entre le peuple et   le gouvernement, entre l’individu et la communauté est levée. La place de chacun et de chacune, ses droits et devoirs sont définis par la loi divine et l’ordre moral qui en découle. La hiérarchisation des rapports femmes- hommes et la négation des droits sexuels soutiennent la solidité de famille patriarcale qui est la cellule de base de la communauté. La supériorité l’homme-père-mari-chef répond à la suprématie de Dieu. La soumission des femmes aurait comme récompense la protection et le respect.

L’idéologisation de l’islam sacralise ainsi les inégalités des droits : entre les musulmans et les non-musulmans, mais aussi entre les musulmans eux- mêmes, entre les femmes et les hommes. Elle établit en même temps une ligne de marquage entre les islamistes et ceux et celles qui n’adhérent pas à cette idéologie et sont donc renvoyés dans le camp des ennemis. La religion se transforme en un instrument d’instauration de l’ordre sous la tutelle des gardiens de la loi sacrée. La codification de la notion de jihad sert cette stratégie. La notion de jihad est, en effet, impliquée à tous les niveaux à des fins défensives, éducatives et offensives, pour défendre et propager l’islam, pour formater de vrais musulmans et pour protéger l’oumma. En même temps, il propose une cause et un pouvoir aux membres de la communauté : celui ou celle qui s’investit dans le jihad acquiert reconnaissance et pouvoir de contrôle sur les autres.

Ces notions se trouvent sous différentes formes au sein de divers courants islamistes. En France, nous retrouvons ces mêmes notions auprès des militant- e-s islamistes, depuis les intégrationnistes qui militent pour infléchir les lois au profit de l’islamisme jusqu’aux jihadistes. La propagande islamiste s’appuie sur ces notions pour dessiner une offre qui attire aussi bien des hommes que des femmes, et cela pour diverses raisons : recherche d’un cadre, de repères, d’une cause, d’un pouvoir, etc. Travaillant dans les domaines des relations interculturelles, et ayant mené diverses recherches action à l’Adri, puis à l’Adric, j’ai été confrontée à l’islamisme en France depuis les années 90. J’ai, ensuite, eu l’occasion de contribuer à une recherche européenne en 2009 et de mener une étude à Lille sur le processus d’adhésion des jeunes à l’islamisme. J’ai pu observer chez des jeunes attirés par l’islamisme, une évolution qualitative dans leur religiosité. D’un islam appris de leurs parents et pratiqué à travers des rituels, ils avaient évolué vers l’islamisme qu’ils concevaient comme « le véritable islam » en opposition à l’islam de leurs parents qu’ils estimaient ignorants. En intégrant la vision islamiste, l’opposition binaire d’un monde musulman victime d’un Occident raciste, islamophobe, impur avait imprégné leur esprit, dévalorisant par le même biais les valeurs démocratiques. Ce qui contribue d’ailleurs à développer un sentiment d’appartenance à une oumma attaquée qui doit faire corps pour se défendre et réhabiliter la dignité bafouée de l’islam. Cette perspective valorise l’islamisme comme une voie de résistance. Les prédicateurs islamistes relaient habilement cette offre. Ce travail de propagande, qu’il s’agisse d’interventions sur le terrain ou par le biais de satellites et d’Internet, s’appuie sur d’importantes ressources financières, alors que les moyens attribués à l’éducation populaire, démocratique et laïque, ne cessent de diminuer.

Aussi, comme je l’ai écrit dans une tribune à ce sujet, l’offre islamiste répond à des désirs paradoxaux d’ordre et de rébellion ; de sécurité et d’aventure ; de soumission et de domination. Les repères sexués sont exacerbés pour exalter la virilité et la féminité musulmanes, notamment en valorisant le voile comme un rempart contre la débauche et la prostitution. Dans leur propagande pour l’ordre moral, l’égalité de sexes, la liberté des femmes et les droits des homosexuels passent pour la source de la décadence de la famille et de la société.

Le fantasme de cet ordre moral se retrouve avec les mêmes penchants misogynes et homophobes dans les mouvements extrémistes chrétiens et juifs. Ces mouvements, qui sont souvent proches des courants d’extrême droite, jouent un rôle politique de plus en plus visible dans diverses régions du monde. La visibilité de l’islamisme ne doit pas occulter l’accroissement  de leurs influences en Amérique et  en  Europe.  L’action  des  évangélistes en Amérique (aussi bien du nord que du sud) et le poids visible des fondamentalistes juifs en Israël en sont des exemples significatifs.

Tous ces mouvements idéologico-religieux en essor ont pour point commun de proposer un ordre moral qui promet de lutter contre la décadence et la corruption dans l’objectif du salut collectif. La morale et la vertu comptent aussi parmi les thèmes qui cristallisent la montée des nouvelles formes de conservatisme dans divers contextes. Elles se déclinent presque toujours dans la négation des droits sexuels (contraception, avortement, homosexualité) et de la liberté d’expression.

Ce n’est donc pas un hasard si dans les instances internationales, des mouvements politico-religieux de tous bords font pression ensemble, au nom du respect des cultures et des religions, afin d’exclure les résolutions relatives à l’égalité et à aux droits sexuels. Les frontières géographiques et géopolitiques et les différences cultuelles et culturelles n’empêchent aucunement leur alliance objective.

Le même phénomène est observé dans les attaques à la liberté d’expression. Les différents courants néo-conservateurs et les extrémismes religieux poursuivent leurs efforts, au sein des instances internationales, pour faire du blasphème et de la critique des religions un délit. Les pressions de  la censure, l’exécution des artistes, des dessinateurs, des traducteurs, des écrivains en sont encouragées. En effet, La violence que génère le fantasme de l’ordre moral mène non seulement à l’étouffement de l’opposition politique, mais aussi à l’oppression de toute liberté et à l’interdiction même de rire et de rêver. Nous en avons vécu des exemples tragiques en France ces dernières années.

Cela doit nous inciter, au-delà de l’indignation, à développer une réflexion sur les facteurs qui favorisent le développement de ces idéaux fascisants.

Cette réflexion conduit à observer l’ampleur des paradoxes qui marquent l’évolution du monde : nous assistons d’une part à l’accroissement des revendications démocratiques, alors que d’autre part l’extension d’une mondialisation fondée  sur  la  marchandisation  (qui  propage  à  outrance  la culture de consommation et la perte de sens) ainsi que le recul des mouvements porteurs d’idéaux humanistes creusent le vide social, politique et culturel. L’ordre moral que prônent les mouvements idéologico-religieux prétend offrir des repères et fournir la sécurité dans un monde en crise. Les replis identitaires font le lit du développement de ces mouvements.

Les stratégies communautaristes en manipulant le culturel et le cultuel favorisent  ces  replis.  L’exacerbation  des  identités  culturelles  et cultuelles nourrit des images figées et globalisantes des cultures et des religions.  Aussi, les images des « musulmans », des « Français » ou des « Européens », représentées comme une masse d’individus interchangeables, occultent leur hétérogénéité. On oublie facilement que les Européens et les Français ne portent pas tous et toutes les mêmes orientations socioculturelles et politiques et que les personnes dites musulmanes, tout comme les catholiques, les protestants, les juifs et les autres personnes partageant une foi commune, sont diverses dans leur rapport même à la religion.

Pourtant, à force d’être utilisé de manière généralisante, le terme musulman devient une identité plaquée qui ne tient pas compte de la diversité de conception du religieux par les personnes musulmanes, ni de leur relation à la religion. On arrive ainsi à confondre l’« être musulman » et l’islamisme.

Cette vision simplificatrice opère autant dans le champ intellectuel, politique que social ou médiatique. La propagation du concept d’islamo- phobie, qui remplace le terme plus approprié de racisme antimusulman, en est un exemple. Alors que le racisme antimusulman désigne un recyclage d’idéaux racistes qui stigmatise les musulmans comme porteurs de sauvagerie et justifie ainsi leur rejet, le concept d’islamophobie sert à empêcher toute approche critique de l’islam. Il jette ainsi le soupçon sur toute opposition et résistance à l’islamisme. De plus, l’instrumentalisation de ce terme encourage la création de concepts similaires, tels que la christianophobie.

Ces confusions renvoient à la réduction du culturel au cultuel qui participe à la perception stéréotypée des cultures et des identités culturelles qui seraient, quant à elles, des schémas immuables.

Sur ce point, il convient de ne pas oublier que la distinction entre le cultuel, le culturel et le politique est relativement récente dans l’histoire    de l’humanité. Elle résulte de l’avènement des valeurs démocratiques et    de l’universalité des droits humains. La démocratie crée en effet sa propre culture à partir des valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité. La laïcité en tant que séparation entre les Églises et l’État confirme et soutient la démocratie comme projet d’autonomie : autonomie du collectif par rapport à toute instance méta-sociale (la gestion de la cité ne revient qu’au peuple et le peuple n’est pas pensé comme un ensemble homogène mais une collectivité d’individus libres et autonomes). Et l’autonomie du collectif va de pair avec l’autonomie individuelle.

Il existe donc un rapport dialectique entre le principe de laïcité et les droits démocratiques. Face au défi de l’essor du néo-conservatisme antidémocratique, ce rapport est plus que jamais à travailler.

En effet, depuis les années 1980, les tensions autour de la laïcité dans  les débats politiques fortement médiatisés sur la place de l’islam en France questionnent les stratégies des mouvements d’extrême-droite, mais aussi des extrémistes religieux qui manipulent la laïcité à leur profit.

Confrontés à cette complexité croissante, les acteurs sociaux et politiques se demandent comment agir en faveur de la laïcité. Cela nécessite de développer des réflexions et des actions capables de répondre aux besoins d’une articulation entre la défense de la laïcité, la lutte contre le racisme et l’antisémitisme et une action féministe en faveur de l’égalité des sexes, de la liberté des femmes et contre l’homophobie.

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